Il y avait une fois un âne qui voulait parcourir le monde. Il rompit son licou, s'échappa de la ferme et prit la route. Il parvint ainsi fort loin, dans les montagnes. L'herbe lui montait jusqu'au ventre, l'eau de la rivière coulait fraiche et limpide et le maître était loin. L'âne se croyait au Paradiset , de béatitude, se mit à braire à pleine gorge.

Le lion l'entendit braire et fut bien étonné : jamais il n'avait ouï rien de pareil. Il s'avança vers la prairie pour observer cet animal inconnu. Il aperçut l'âne au milieu du pré et son étonnement s'accrut. Il n'avait jamais vu un animal si haut sur pattes et muni de si grandes oreilles. Il s'approcha de l'âne qu'il salua fort civilement :

" Sois le bienvenu, frère ! D'où viens-tu donc et quel est ton nom ?

- Je viens de contrées très lointaines et je me nomme Superlion, répondit l'âne.

Le lion ressentit quelque crainte.

- Superlion ? Cela signifierait-il que, là d'où tu viens, tu es le seigneur de tous les lions ?

- Cela est vrai ! Nul animal au monde ne saurait se comparer à moi !

- S'il en est ainsi, grand Superlion, restons ensemble et nous serons les plus forts de tous les animaux. Partons à la chasse ! "

En chemin, ils se trouvèrent devant une rivière. Le lion la franchit d'un bond. L'âne descendit dans l'eau et faillit se noyer dans le courant rapide. Avec beaucoup de difficultés, il parvint à gagner l'autre rive.

" C'est bien étonnant, dit le lion. Toi qui es si fort, pourquoi as-tu tant de mal à traverser cette rivière ? Ne sais-tu pas nager ?

- Moi, répondit l'âne ! Je nage comme un poisson !

- Alors pourquoi es-tu resté si longtemps dans l'eau ?

- N'as-tu donc pas vu le poisson gigantesque que j'avais attrapé avec ma queue ? C'est tout juste s'il ne m'a pas entrainé au fond ! "

Le lion admira la force de Superlion et son habilité à la pêche et poursuivit sa route. En chemin, ils se heurtèrent à un grand mur. Le lion le franchit d'un bond. Mais l'âne s'échina à l'escalader une bonne demi-heure et, quand il fut parvenu au sommet, il y resta ne pouvant plus ni avancer ni reculer. Et le lion demanda :

" Que fais-tu donc là-haut ?

- Ne vois-tu pas que je me pèse, répondit l'âne. Je veux savoir lequel de mon avant-train ou de mon arrière-train est le plus lourd ".

Il sauta enfin à bas de son mur, en grand danger de se rompre le cou.

" A ce qu'il me semble, dit le lion quand l'âne eut touché terre, tu m'as débité des contes et tu n'es pas aussi fort que tu le prétends !

- Par exemple ! Veux-tu qu'on se mesure : voyons qui, le premier, réussira à abattre ce mur ! "

La suite demain.