• ATTENTION ! CETTE HISTOIRE PEUT HEUTER LA SENSIBILITE DE CERTAINS LECTEURS.

     Brens ( four du Furans )

     

    Histoire vraie ou légende ??

     

    Au Moyen-Age, les moines étaient réputés pour la qualité des diots qu’ils fabriquaient. Il paraît même que le diot du Mont du Chat s’était taillé une place de choix dans le fief du légendaire saucisson de Lyon. Un jour, un brave Lyonnais aperçut en coupant son diot - ô horreur - un doigt humain ! La moulinette avait mal fait son travail.

     

    La maréchaussée, intriguée par la disparition d’un certain nombre de voyageurs devant traverser le col mena une enquête. Quelle ne fut sa stupeur de découvrir que ces malheureuses personnes avaient toutes été accueillies par les moines, qui pratiquaient l’hospitalité à l’envers, si l’on peut dire. Les pauvres voyageurs confiants qui s’arrêtaient là pour se réconforter étaient immanquablement trucidés et les messieurs à robe prélevaient leur chair afin d’en garnir leurs diots.

     

     Est-ce cette chair qui donnait un si bon goût ?

     

     

    Allez, pour me faire pardonner de cette histoire horrible, je vous offre deux magnifiques descriptions de la Dent du Chat.

     

    Dent du Chat

     

     

    " A gauche, le Mont du Chat dresse pendant deux lieux contre le ciel une ligne haute, sombre, uniforme, sans ondulation à son sommet, on dirait un rempart immense, nivelé par un cordeau. A peine à son extrémité orientale, deux ou trois dents aigües de rocher gris interrompent la monotonie géométrique de sa forme, et rappellent que ce n’est pas une main d’homme, mais la main de Dieu qui a pu jouer aves ses masses. "

    Alphonse de Lamartine, poète ( le Mont du Chat vu du lac du Bourget ).

    

    Dent du Chat

     

     

    " Je suis né dans un vieux château adossé à une montagne qui a trois aiguilles en forme de dents, celle de droite est une grosse molaire, celle de gauche est une dent pointue qui se détache menaçante comme si elle voulait mordre dans les nuages ... Elle règle la vie de la contrée, donne l’heure, annonce les orages, tantôt se rapproche de vous, tantôt s’éloigne vivante et mystérieuse, on l’appelle la Dent du Chat. "

    Charles Dullin, homme de théâtre.

     

     

    Envie d’en savoir un peu plus ?

     

    Vues sur le lac du Bourget .

    La Dent du Chat.

    Le Col du Chat.

    La légende de la Dent du Chat.

     

     

     

     


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  • Lac d'Aiguebelette

     

     

    Il était une fois une petite ville riche et prospère au bord du lac; ses habitants menaient grande vie; oisifs, ils ne pensaient qu’aux plaisirs. Un jour, un miséreux bien mal vêtu se présenta pour mendier un peu de pain et de chaleur. Toutes les portes restèrent égoïstement fermées. Une seule s’ouvrit : celle d’une femme déshéritée de la ville et celle-ci accepta de partager son frugal repas. Or, ce mendiant était le Christ qui s’était déguisé pour éprouver ces villageois au coeur dur. En punition, le lendemain toute la ville se retrouva couverte par les eaux du lac sauf la maison de la vieille dame et celle de sa fille que le Christ avait épargnées et qui demeuraient intactes sur deux îles reliées par un chemin à pied sec.

     

    Lac d'Aiguebelette

     

    Le lac d'Aiguebelette, qui signifie « belles petites eaux », ou parfois Lac Vert, est un lac naturel de l' Avant-Pays savoyard.

    Dans la partie sud du lac se trouvent deux îles entourées de roselières.


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  • Légende du lac d'Annecy, du lac du Bourget et du lac Léman.

     

    Annecy

     

     

    Lac d'annecy. 

     

    Il y a bien des millénaires, alors qu'elle n'avait encore reçu aucun nom, la région savoyarde était confiée à trois anges qui en assuraient la protection. Du haut du ciel, ils surveillaient montagnes, vallées, torrents, rivières, bois et forêts. Ils n'avaient guère de travail, car les habitants, peu nombreux, vivaient en harmonie. Aussi les anges, fascinés par la splendeur des grands glaciers immaculés et par l'impétuosité des torrents, passaient-ils leur temps à contempler la nature ...

     

    Lac du Bourget

     

     Lac du Bourget.

     

    Cependant un matin, ils se virent confier une nouvelle mission. Contrariés mais obéissants, ils se plièrent aux ordres et le coeur en peine, prirent le chemin du nord où leur destin les menait. Ils survolèrent lentement la région pour en admirer une dernière fois le superbe panorama.

     

    Annecy

     

    Lac d'Annecy. 

     

    Chacun des anges versa une larme qui descendit lentement vers la terre. Portées par le vent, les trois larmes grossirent, grossirent tant, qu'elles se transformèrent en trombes d'eau qui en atteignant le sol formèrent les trois principaux lacs des pays de Savoie.

     

    Lac du Bourget

     

    Lac du Bourget.


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  • 100 1818

     

    Mais quand arriva Jean Guerne et sa barque, la lutte devint terrible. C’est ce que comprenaient nombre de gens du pays que, par malheur, Jean soupçonnait de radoter un peu, et d’ailleurs, il ne voyait aucune menace sur les eaux, que sa barque franchissait tous les jours, sans encombre.

    Or, une nuit d’hiver qu’il gelait à pierre fendre, tant que corbeaux, canards et oies sauvages avaient fui, Jean Guerne, sa journée achevée, jouissait d’un repos bien gagné et ronflait auprès de sa femme.

    Soudain, dans le silence rendu plus profond par la neige qui recouvrait la terre, une voix appela:

    - Jean Guerne, disait-elle, je voudrais passer l’Albarine.

    Jean dormait d’un sommeil de plomb et ne bougea point.

    La voix se fit entendre à nouveau, plus impérieuse, et cette fois, réveilla le passeur.

    - Le Diable t’emporte, murmura-t-il. Si tu crois que je vais descendre sur la berge par un temps pareil, tu te trompes. Je suis au chaud et j’y reste.

    - Faut-il aller chez toi te faire lever de force ? reprit la voix. Tu t’en repentiras, mon bonhomme. Ta mule tousse. Veux-tu que son mal s’aggrave ?

    Jean, éberlué, frissonna.

    " Ma mule ? songea-t-il. C’est vrai qu’elle tousse, mais elle n’est pas sortie. Alors, qui peut le savoir ? " 

    Cette voix n’était pas d’ici. Elle n’avait pas l’accent traînant du pays.

    - Attends-moi, disait-elle. Je vais te parler et ce sera tôt fait.

    Effrayé, Jean Guerne sauta hors du lit et courut à la fenêtre.

    - Une seconde et je sors ! cria-t-il.

    - Dépêche-toi, reprit la voix vers la rivière.

    Je vous l’ai dit, Jean Guerne était fort, grand et bâti en athlète; il ne craignait personne et eût tenu tête à un gendarme. Mais cette voix de femme, presque brutale et qui vibrait étrangement, ne lui disait rien qui vaille, ne lui rappelait aucune autre voix. Il fit la grimace, ne pouvant surmonter son trouble.

    Sa femme, qui avait allumé la chandelle, le regardait.

    - M’est avis qu’il serait préférable que je t’accompagne, dit-elle.

    - Pourquoi ça ?

    - Il y a un loup qui rôde par là ...

    - Sois sans inquiétude : suis-je un enfant ? Fais-moi chauffer du vin pour mon retour, j’aurai sans doute besoin d’un réconfort.

    Et, prenant d’une main un long et solide bâton, et de l’autre sa gaffe, il appela son chien, qui refusa de sortir. Jean songea au loup dont avait parlé sa femme. Il fit un nouvel appel, mais même spous la caresse de son maître, le chien s’enfuit, épouvanté.

    " Je ne l’ai jamais vu dans cet état, se dit Jean. Pourquoi a-t-il si peur ? " 

    Cependant, il agitait hardiment sa gaffe, traversa sans encombre son jardin, son verger, qui allait jusqu’à la rivière, mais arrivé près de sa barque, il vit, au clair de lune, une jeune femme grande et fière, mince et flexible comme un bouleau, les cheveux flottant sur les épaules et vêtue fort légèrement d’une robe blanche, sans qu’elle parût s’apercevoir du froid intense.

    - Me voilà ! dit Jean, un peu essoufflé.

    - Eh ! bien, maintenant, hâte-toi de défaire la chaîne qui retient la barque, je suis pressée.

    Chose incroyable, la rivière avait grossi pendant la nuit et ses flots troublés avaient quelque chose de sinistre et de menaçant.

    - Je suis désolé, mais la rivière est trop haute, dit Jean Guerne, qui avait pâli à la vue de cette apparition et de cette crue subite et inexplicable.

    - Je ne te demande pas un service pour rien; je suis attendue et je ne puis rester ici plus longtemps. Voici trois écus pour ta peine. Marche et promptement.

    - Vous voyez bien que la chose est impossible ... pourtant ...

    En recevant dans sa main trois écus - une somme importante pour quelques minutes de travail -, Jean Guerne hésitait. Il songeait déjà aux douceurs qu’il pourrait se procurer pour lui et sa femme avec cet argent ...

    - Eh ! bien ... tu as dit : pourtant ...

    - Pourtant, j’accepte.

    La dame s’élança alors dans la barque et s’assit tranquillement, comme si elle n’eût couru aucun danger.

    Jean guerne mit les trois écus dans son gilet, ouvrit le cadenas, défit la chaîne, tendit la corde, appuya sa gaffe sur le gravier et se jeta dans le courant.

    Mais à peine avait-il avancé de quelques mètres que la barque sembla vouloir s’enfoncer dans la rivière. Pourtant, c’était une barque neuve et assez solide pour passer de lourds chariots. Or, il fallait se rendre à l’évidence : elle n’obéissait pas à la gaffe, et l’eau bouillonnante menaçait de passer par-dessus le bordage. Jean Guerne, bravement, redoubla d’efforts et, tête baissée, d’un vigoureux coup de gaffe, gagna le rivage. Sautant sur la terre ferme, il entoura un saule d’une amarre supplémentaire pour maintenir son bateau.

    - Prenez ma main, dit-il ensuite à la passagère pour l’aider à sortir de la barque.

    Mais elle était déjà à côté de lui, les yeux brillant d’insolence.

    A cette vue, Jean Guerne perditson sang froid.

    - Comment êtes-vous là ? murmura-t-il. Je ne vous ai pas vue vous lever ...

    Elle éclata de rire.

    - Tu as cru dompter l’Albarine, mais l’Albarine brisera ton bateau, Jean Guerne. Tu ne t’en serviras pas longtemps. Adieu ... Tu peux aller te coucher.

    Jean, interloqué, faisait déjà demi-tour, quand la passagère parut se raviser.

    - Attends, dit-elle. Si tu veux aller demain au marché de Saint-Rambert, écoute ce conseil : fais relever le fer de ta mule. Maintenant, au revoir. Pense quelquefois à moi ...

    Elle riait encore et Jean Guerne était terrifié ...

    Qui donc était cette créature qui l’avait appelé dans la nuit ? Comment savait-elle ce qui se passait chez lui ? Et pourquoi prédire que son bateau serait détruit ?

    La rivière n’était que tourbillons et vagues. Il rattacha solidement sa barque et revint chez lui plus mort que vif.

     

    Chaley

     

    Sa femme l’attendait avec du vin chaud. Mais avant de dire quoi que ce soit, Jean porta la main à son gilet : les écus n’y étaient plus. A leur place, trois feuilles de noyer, alors que depuis des mois, les noyers n’avaient plus de feuilles.

    Jean se mit à pleurer. Quand il eut conté son aventure à sa femme, elle lui dit :

    - C’est la Dame blanche de la rivière, la fée de l’Albarine. Les bonnes gens avaient raison. Mon Dieu, que va-t-il bien nous arriver ?

    Car cette fée n’a jamais eu bonne réputation, je vous l’ai dit.

    Jean Guerne eut de la fièvre pendant des jours.

    L’absence de passeur, l’assurance avec laquelle il déclara que la rivièreavait débordé alors qu’elle était basse, inquiétèrent les habitants de la région. Que signifiait tout cela ? Que Jean Guerne était devenu subitement fou ou bien ...

    L’année suivante, une crue terrible fit changer le cours de l’Albarine, qui s’ouvrit un nouveau lit, hors de l’ancien.

    En voyant la barque inutile, échouée sur les graviers, la femme de Jean Guerne lui fit cette remarque :

    - La Dame blanche l’avait dit ...

     Et, à son tour, elle raconta l’histoire à qui voulait l’entendre. Ce fut la fin du mystère.

    Beaucoup plus tard, un pont fut édifié à la place de la traille. Qui peut savoir si la fée de l’Albarine s’en contentera toujours ?...

     

    Légende tirée de " Contes et légendes du Lyonnais, de la Bresse et du Bugey " Laurence Camiglieri.


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  • Au temps jadis, les rivières couraient à leur gré et l’Albarine, rivière libre et sauvage s’il en fût, permettait aux montagnes rocheuses qu’elle traversait, dans une étroite vallée, de se refléter dans ses eaux limpides, et aux truites, anguilles et écrevisses de se multiplier.

    Or, les hommes imaginèrent barques, ponts et autres engins et l’Albarine, pleine d’orgueil, eût tôt fait de les jeter à bas. Ce fut comme une sorte de défi ...

    Cependant, Jean Guerne, de Torcieu, fort comme un taureau et hardi comme un moineau, s’en soucia si peu qu’il décida, un beau matin, d’installer une traille à l’usage des gens du pays. Il planta donc dans la rivière deux gros piliers, qu’il réunit par une corde, puis il amena une barque et invita hommes, femmes et enfants à passer l’Albarine ...

    Les habitants de Torcieu, comme ceux de Saint-Rambert et d’Ambérieu, commencèrent à hésiter, redoutant les caprices de la rivière et de sa fée protectrice qui, le soir, apparaissait parfois à ceux qui s’égaraient sur ses rivages. Puis certains s’enhardirent à monter dans la barque. Tout allait à merveille. Jean Guerne se frottait les mains. Par malheur, il existait encore beaucoup de personnes qui avaient ouï dire à leur grand-mère l’histoire que voici :

     

    Chaley

     

    Un soir de vogue où le vin du pays avait coulé en abondance, une dizaine de garçons rentraient à Torcieu en chantant. Il était très tard, et les gens sérieux avaient depuis longtemps regagné leur maison. Eux, après avoir beaucoup dansé, commençaient à tomber dans une sorte de somnolence et, pour marcher droit et ne point rêver, ils se donnaient le bras et tenaient ainsi toute la longueur du chemin.

    La nuit étalait de multiples étoiles et c’était plaisir que de marcher ainsi, auprès de l’Albarine, de ses prairies et de ses arbres.

    A la sortie des Balmettes et en vue du château de Saint Germain, minuit sonna au clocher d’Ambérieu.

    Nos garçons, en riant, comptèrent les coups, et au dernier, l’un d’eux se retourna et tressaillit. Il venait de voir, à cent mètres de lui, une jeune fille vêtue de blanc qui, d’un pas léger, avait l’air de les suivre, semblant plutôt glisser que marcher. Ses longs cheveux flottaient au vent.

    Troublé, il toucha le bras de ses camarades, qui se retournèrent. Et, malgré leur force, l’habitude qu’ils avaient de courir bois et loups, ils éprouvèrent une surprise si grande - presque une peur - qu’ils s’arrêtèrent.

    Elle s’arrêta en même temps. Elle aussi, avait-elle peur ?

    Ils reprirent courage, lui sourirent, et lui demandèrent à mi-voix :

    - Qui êtes-vous ?

    - D’où venez-vous ?

    - Sommes-nous des connaissances ?

    Et comme elle ne répondait pas, ils s’approchèrent d’elle.

    Au premier pas, elle recula vivement. Donc, pensèrent-ils, c’était elle qui était effrayée.

    Dix garçons, forts comme des Turcs, qu’avaient-ils à redouter, je vous le demande ?

    Pourtant, ils hésitaient. Si elle avait été une simple paysanne, ils lui auraient offert, à la bonne franquette, de faire route avec eux, mais le moyen de faire quelques avances à ... à qui, au juste ? songeaient-ils en se regardant.

    - Une demoiselle d’Ambérieu, dit tout haut un grand gaillard.

    - Seule, à cette heure ? Non, ce n’est pas possible.

    - Une dame de Lyon, alors, avança un autre. Elle va prendre la voiture du matin, au Lion d’or.

    - Ce ne doit pas être une vraie dame, déclara un futé, je veux dire une dame comme il faut.

    - Tu as raison, répondirent-ils tous en choeur.

    - Alors, je vais lui parler, reprit le futé.

    - Je t’accompagne, dit un autre.

    Et tous deux prirent le pas de course, mais la jeune fille immobile, dès qu’ils furent près d’elle, s’éloigna, comme la première fois, aussi légère qu’un oiseau et sans montrer la moindre gêne.

    En voyant avec quelle facilité elle maintenait ses distances, nos deux audacieux s’arrêtèrent et se dirent :

    - Nous la rattraperons vers le pré.

    Et ils rejoignirent leurs camarades.

    Ils reprirent en chantant le chemin d’Ambérieu.

    Quand ils furent entre des vignobles et une prairie assez vaste que fermait l’Albarine, un rapide coup d’oeil leur apprit que le piège avait réussi. L’inconnue les suivait, insouciante, et s’était même rapprochée, sans prévoir le danger qu’elle courait.

    Tout à coup, les deux plus lestes s’élancèrent dans le buisson qui séparait les vignes du chemin. Pliés en deux, invisibles, ils coururent du côté de Saint-Rambert et, arrivés à l’extrémité du vignoble, débouchèrent sur la route : ils avaient ainsi coupé la retraite de la jeune fille de ce côté-là.

    Les autres avaient couru à l’autre extrémité de la prairie, du côté opposé, cest-à-dire du côté d’Ambérieu; là aussi, toute fuite était impossible, on ne pouvait plus passer.

    Aussitôt, la troupe s’arrêta, fit volte-face et, se déployant en demi-cercle, se précipita vers l’inconnue pour l’envelopper. La manoeuvre était parfaitement réussie.

    Elle, sansse presser, se détourna du chemin, traversa légèrement un buisson au plus épais des épines, alla dans la prairie et s’engagea sous les noyers et les saules, avec le calme et la sérénité d’une reine qui se promène dans son parc.

    Intrigués, stupéfaits, nos garçons la suivirent, élargissant leur cercle, bouchant toutes les issues et, maîtres des lieux, se rapprochèrent d’elle en poussant de grands cris.

    Elle était perdue sans retour : la rivière, à cet endroit, était large et profonde. Elle n’avait donc aucun espoir de s’échapper. Déjà, les mains s’avançaient pour la saisir, déjà des cris de triomphe s’élevaient quand les petits pieds, qui glissaient si légèrement sur l’herbe, quittèrent le rivage, s’avancèrent sur les flots, brillants, et marchèrent sur les eaux, avec la même facilité que sur le chemin.

    Arrivée au milieu du gouffre, elle se retourna vers les jeunes gens, ahuris, épouvantés, leur fit un geste de menaceou de moquerie, secoua ses longs cheveux et, lentement, glissa sur l’onde. Elle était chez elle ... dans son élément.

    - C’est la fée de l’Albarine, dit l’un.

    - Oui, dit un autre, la Dame blanche du pays ...

    De quoi les avait-elle donc menacés ?

    Tremblants, ils reprirent la route, traversèrent Ambérieu dans un silence angoissé. Là, ils se jurèrent de ne jamais dévoiler leur aventure sous peine de se couvrir de ridicule.

    Maisle lendemain, ils ne purent se lever. Tous avaient la fièvre, et divaguaient, ne reconnaissant même pas les membres de leur famille. Aucun n’osa révéler la cause de leur maladie.

    Ce fut longtemps après que le mystère s’éclaircit : en reliant entre elles le paroles prononcées pendant leur délire, des mères de nos garçons comprirent que la fée de l’Albarine leur avait joué un tour à sa façon.

    Un méchant tour, rappelez-vous ? Et les bonnes gens se rappelaient et se figuraient que la fée allait recommencer : il n’en fut rien pendant longtemps.

     

    100 1823

     

    La suite demain.


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